« Graphothérapie », c'est excellent, demandez à n'importe quel psy ! J'ai lu quelque part que la quantité de gens qui se soulage en écriture, comme on... comme on pisse ou comme on vomit le déjeuner qui ne passe pas, devient de plus en plus importante. Pauvres éditeurs !
QUATRIEME WEEK-END
Je le regarde faire ses bagages... Il est nu. Il bouge vite et balance ses affaires dans un énorme sac de voyage. A vrai dire, il le fait d'une manière assez ordonnée (grande pratique, habitude), mais avec quel acharnement ! Il a l'air furieux. Il est énervé. Il est fâché.
Maintenant, je sais ce que cela signifie : il se sent malheureux.
Je reste allongée sur le lit. Notre lit. Pour deux nuits déjà écoulées. Quand il passe entre moi et la fenêtre, je vois dans un fin rayon de soleil pénétrant de l'extérieur une goutte translucide au bout de son pénis. Elle brille comme de l'ambre.
Je ferme les yeux : Je me vois écrire tout ça. Je le vois lire ces lignes. Demain ? Dans un mois ? Dans un an ? Je voudrais le prendre dans mes bras. Je voudrais qu'il me prenne dans ses bras. Et qu'on « s'encoconne » ainsi l'un dans l'autre. Je m'abandonne à mon amour. Je laisse la Bête sortir. J'entrouvre la porte de son refuge... non, de la « cage » où elle a été enfermée de longues années et où je la remets encore de temps à autre : il faut bien la maîtriser, quoi. Je sais qu'un de ces jours les rôles seront inversés : elle prendra définitivement le dessus. Et je resterai soumise, écrasée, aplatie... Ah, je me fais peur, je me fais pitié, pauvre petite ! ...La Bête sort. Elle a déjà essayé de le faire ce matin dès mon réveil. Mais je ne l'ai pas laissée faire. J'avais trop besoin de mon sang-froid. Enfin libérée, elle sort. Elle me regarde. Elle ne se jette pas sur moi. Elle fait... comme l'aurait fait une vague : elle m'engloutit.
Je pense qu'en amour on se comporte comme à la plage. Il y a des gens qui tâtent sagement l'eau : est-elle froide ? est-elle aujourd'hui humide ou pas trop ?.. D'autres s'y jettent sans réfléchir : preuve de courage ? démonstration de bêtise ? Je n'attends jamais les vagues prudemment en me tournant de côté pour diminuer la surface d'affrontement. Je ne fais pas de petits sauts pour rester à la surface. J'écarte un peu les pieds à la recherche de la stabilité (peut-on être stable sur le sable qui coule entre les orteils ?), je me tourne face à la mer et j'attends. Quand la vague arrive, j'entrouvre mes bras et je m'abandonne... Je ne compte pas qu'un jour la vague s'arrête à un pas de moi et m'épargne. Je n'attends pas ce genre de grâce de la part d'une lame. Je ne viens pas pour être ménagée. Je viens pour affronter son choc avec tout mon corps, je viens pour qu'elle me plie, qu'elle me tourne, qu'elle me soulève, qu'elle m'entraîne et me jette essoufflée sur le sable du rivage... Je le fais pour ces moments d'existence à l'intérieur de la vague. Où notre fusion est absolue. Où nous ne faisons qu'un. Bof, ce n'est pas plus idiot qu'un saut à l'élastique : il s'agit de la même décharge d'adrénaline.
Mais la Bête ne se satisfait pas de m'avoir trempée, de m'avoir traînée sur les cailloux et de me laisser toute meurtrie. Elle m'inonde de l'intérieur. Elle me noie en moi-même.
...
Je me lève et je me dirige en titubant vers la salle de bains en emmenant ma Bête. Je le laisse seul. Il est amoureux et il vit mal nos séparations. Chaque fois c'est un déchirement. Soudain, je me surprends à une pensée sadique : pourvu que ça dure ! Je ne veux pas qu'il souffre ! Ce n'est pas du tout ça... Mais j'ai tellement besoin qu'il m'aime... Mon Dieu, mais qu'est-ce que j'en ai besoin !.. Je me nourris de cet amour. Je nourris de son amour mon amour
... Depuis toujours, je voulais vivre une passion. Je la désirais de toutes mes forces. J'en rêvais : d'une passion physique et sensuelle, qui dévore l'esprit et tord le corps, qui fait rugir d'envie et pleurer de bonheur... Mais que ça ne se passe plus que dans ma tête ! Je voulais vivre une passion. Quand je m'entends dire (même penser) cela, je me sens contraint : j'imagine bien qu'il soit normal que des jeunes filles (mais vraiment très jeunes, après elles deviennent, certainement, plus intelligentes) puissent vouloir « une passion pour de vrai ». Pour un homme de mon âge... c'est peu de dire que ce n'est pas sérieux. Je sais aussi, je me rends compte que ce ne peut être gratuit, une passion, que ça se paye : avec des souffrances et un sentiment de culpabilité, avec la peur d'être trahi, d'être quitté et avec une autre peur, celle de faire du mal en quittant, en trahissant l'autre et, sans doute, avec encore mille choses qu'on ne nous précise pas dans le « contrat de passion », mais que celle-ci peut nous coûter. Je me disais : « Tu n'oseras jamais, même si l'occasion se présente. » Je ne me connais que trop bien...
Bonsoir, Je suis sous le charme de ces extraits, cette écriture fluide...au risque de paraitre prétentieuse, j'ai l'impression que vous m'avez volé mes tournures, certains de mes propos...:-)) Blague à part, j'aime écrire ce que j'aimerais lire -je sais que c'est une évidence, énoncée avec confusion, certes!- et c'est ce qui s'est produit à la lecture de vos extraits, fait très très rare chez moi! Je peux même dire que vous êtes le premier auteur sur TBE dont l'écriture provoque cela en moi...mon/ma rival(e) alors!:-))) Sauf que je trouve votre écriture plus aboutie que la mienne! Tout de même...c'est étrange comme sensation...vous avez une écriture assez proche de certains écrits de P.Fournel, auteur qui n'a plus à faire ses preuves et que j'ai la chance et l'honneur de compter parmi mes amis...
Incroyablement votre livre décolle direction mon panier plus très neuf, à bientôt je l'espère... Anne
'J'ai lu quelque part que la quantité de gens qui se soulage en écriture, comme on... comme on pisse ou comme on vomit le déjeuner qui ne passe pas, devient de plus en plus importante. Pauvres éditeurs !'
J'aime beaucoup votre style, je ne manquerai pas de lire ce livre, mais quand j'ai voulu cliquer on m'a dit que ce livre n'était plus disponible. Cordialement Edmonde
J'étais en train de corriger 2 coquilles. C'est fait. Mais j'ai du tout récharger.
Je pense qu'il y a encore problème avec les bannières. Donc, si un 'clic direct' ne marche toujours pas, vous pouvez accèder par: Catalogue - Recherche par auteur (Aber) - cela vous conduira jusqu'à la page L'IMPUISSANCE.